quarta-feira, julho 20, 2005
Kenneth White
Poète d’origine écossaise, Kenneth White vit en France depuis trente ans. Quand il n’est pas en voyage, du moins. Une occasion de pénétrer sa maison en son absence…

Quelque chose fait que je ne parviens pas à rencontrer Kenneth White. Immanquablement, je le manque. Cette fois, le voilà parti dans les mers du Sud, lui, l’homme des espaces nordiques. Qu’à cela ne tienne ! Il m’ouvre sa maison en son absence. Confiance sans prix puisqu’il ne me connaît pas, signature en acte qui vaut mieux que tous les discours. La Maison des marées, son dernier livre, me servira de guide.
Que les Bretons me pardonnent, mais Trébeurden, c’est le bout du monde. Pluie à Rennes, changement à Guingamp, une micheline verte nous conduit à Lannion où vient nous chercher Luce, l’amie des White qui garde la maison. Il fait frais, mais le vent a chassé la pluie et « un ciel opalescent comme l’intérieur d’une huître illuminée » allège le paysage, dessine les contours des haies et fait flamboyer les rhododendrons. Le jardin prend des allures méditerranéennes. Depuis 1983, Kenneth et Marie-Claude White, épouse, photographe et traductrice, sont installés à « Gwenved », le pays blanc, un ensemble de trois petites maisons en terre d’Armor. Lieu de concentration, la maison est aussi pour Kenneth White point de départ vers des voyages imaginaires ou réels. Comme l’océan rythme les jours, elle marque l’équilibre entre immobilité et mouvement, sédentarité et nomadisme. Maison de l’ici et des ailleurs, Gwenved la bien nommée matérialise l’univers mental de White. Dans son « atelier atlantique », la lumière entre de trois côtés et se réfléchit sur les murs et la table de travail blancs. Blancheur aussi du papier, accroché par des pinces à dessin, et que parcourt l’encre noire. Seule dans la pièce, je me pénètre de l’atmosphère. Des courants opposés se mêlent, yin et yang mystérieusement accordés. Les champs d’énergie créatrice sont perceptibles. La profusion s’organise méthodiquement : collections de pierres, de coquillages, de plumes rangées par tailles, couleurs ou origines. Chaque objet est multiplié : les crayons, les feutres noirs, les bouteilles d’encre de Chine pour la calligraphie, les rouleaux de scotch… Tout s’offre au regard, tout est à portée de main. Sur le sol, des chemises de couleurs renferment les manuscrits en cours, maintenues par de grosses pierres. L’ensemble compose une toile abstraite et concrète à la fois. L’esthétique jaillit de la pratique. Le monde entier est là, concentré dans les cartes de la Chine, du Japon, de l’Alaska ou du Québec. La géopoétique de White se lit à murs ouverts du sud de l’Asie au nord de l’Amérique. Elle inclut aussi le temps des alphabets runiques à Montaigne, d’Érasme à Thoreau, de Nietzsche à Rimbaud et aux surréalistes. Certains documents jaunis inscrivent aussi des strates, comme une histoire personnelle de ses curiosités. L’atelier atlantique est la mise en scène d’une conscience poétique. En descendant un escalier jalonné de bouteilles de rhum (vides !) soigneusement alignées, on pénètre dans la bibliothèque. Étagères croulant sous les livres en plusieurs langues, mappemondes, squelettes de poissons, coquillages, images de bateaux : c’est une grotte marine, l’antre pélagique, le monde des profondeurs et peut-être le soubassement du « phare intellectuel ». Plus sombre, plus désordonné, débordant de sources de savoir : le puits d’où le poète remontera à la lumière signes et symboles.
« Où sommes-nous ? Dans un paradis poétique. »


por Évelyne Bloch-Dano, para Magazine Litteraire n° 444
Juillet-Août 2005


Do autor: La Maison des marées, Kenneth White, traduit de l’anglais par Marie-Claude White, éd. Albin Michel, 282 p., 19 €.
posted by George Cassiel @ 5:10 da tarde  
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"Este era un cuco que traballou durante trinta anos nun reloxo. Cando lle chegou a hora da xubilación, o cuco regresou ao bosque de onde partira. Farto de cantar as horas, as medias e os cuartos, no bosque unicamente cantaba unha vez ao ano: a primavera en punto." Carlos López, Minimaladas (Premio Merlín 2007)

«Dedico estas histórias aos camponeses que não abandonaram a terra, para encher os nossos olhos de flores na primavera» Tonino Guerra, Livro das Igrejas Abandonadas

 
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